Muscle vengeur (Auteur: sonfux@wanadoo.fr )

Tony venait d’arrêter sa voiture devant le minuscule square qui l’avait vu grandir. Derrière, se dressait, immense, la barre HLM d’un quartier perdu de la grande banlieue parisienne ; à côté le complexe sportif, plus loin, le lycée…, des flots de souvenirs l’assaillirent, des souvenirs douloureux à l’époque - pas si lointaine - où il était malingre, p’tit avorton, souffre-douleur d’une bande de quatre gars avec à sa tête Fredo, le caïd du quartier, fan de kung-fu et d’arts martiaux comme les p’tites frappes qui l’accompagnaient.

Pendant trois ans, de l’âge de 15 à 18 ans, en silence, il avait enduré les moqueries, les bousculades et même les coups assénés par ses petits camarades sans se plaindre, les poings serrés mais la haine au cœur.

Le voilà maintenant revenu dans son quartier…il a 25 ans et a bourlingué pas mal à travers le monde, après s’être engagé, deux ans, dans la Légion. Il y a appris la discipline, l’endurance et il y a appris à développer son corps. Revenu dans la vie civile, il s’est lancé à fond dans la muscu, dont il a fait son métier.

Il ouvre la portière de la BMW. Qui reconnaîtrait le modeste Tony dans cette carcasse de bodybuilder qui descend lentement de la voiture ?  Son corps s’est transformé comme seul le bodybuilding permet une telle transformation : 1,70m (il n’a pas grandi…) mais 110 kg de muscles puissants (contre les 55 kg de ses 18 ans !). Son tee-shirt, noir, moulant, laisse apparaître des bras canon de 52 cm, pleins, volumineux, durs ; il laisse aussi deviner des pecs surpuissants, larges et gonflés de sang. Son corps en V parachève l’impression d’invincibilité qu’il dégage.

On avait dit  à Tony que Fredo était désormais employé comme maître-nageur à la piscine municipale de plein air. Il faisait chaud ce jour-là et l’envie irrésistible de revoir son « tortionnaire » le taraudait. Le voilà devant la grille d’entrée de la piscine ; par delà, assis sur la chaise haute, il aperçoit Fredo, Fredo le maître-nageur, le Fredo de son adolescence. Il n’a pas tellement vieilli mais Tony a beau le regarder, l’observer (Fredo fait le beau avec ses lunettes noires et son mini slip, ses anciens accolytes sont là aussi à draguer les minettes), il n’arrive plus à comprendre la terreur qu’a a pu lui inspirer ce gars lorsqu’il voit son corps certes musclé mais d’une muscularité si fine, si banale, face à son corps devenu massif.

Il pousse la grille, attiré par une envie d’en découdre, sourde jusqu’à présent mais qui grandit de plus en plus au fur et à mesure que le souvenir des humiliations –grandes ou petites – ressurgit. Le voilà qui s’installe au bord de la piscine ; plusieurs personnes ont déjà remarqué son physique hors du commun. Lentement, il retire son tee-shirt et libère sa masse pectorale digne des Dieux de l’Olympe qui laisse sans voix ses voisins immédiats. Il déboutonne son pantalon et son slip vert fluo – qui met en valeur son bronzage et sa virilité de mâle – permet de découvrir des jambes d’acier, au galbe surdimensionné.

Le voilà qui plonge dans la piscine, fait quelques longueurs alors que ses voisins immédiats ont à peine eu le temps de se remettre de leurs émotions et de se pincer face à l’Adonis qu’ils viennent de voir. Tony ressort de l’eau ; l’eau ruisselle sur son corps bodybuildé, les rayons de soleil caressent sa peau ambrée et soulignent les formes de sa musculature hors du commun. Lentement, il essuie les traces d’eau sur le creux de ses pecs, puis sur leur base, sur la bosse de ses bras, l’arrondi de ses épaules, le dentelé de ses abdos, l’épaisseur de ses entre-cuisses.

 Il se décide et se dirige lentement vers la chaise du maître-nageur. Fredo a vu cet athlète mais ne l’a pas reconnu.

« Salut Fredo », dit Tony au pied de la chaise « Tu ne me remets pas ? »

Fredo fronce les sourcils ; ce visage lui dit bien quelque chose mais les connexions ne sont pas au niveau du cerveau, le corps sans doute, tant transformé…

« Tony, ton vieux copain Tony, la « p’tite merde » comme tu m’appelais. Tu te rappelles ? »

Fredo ne comprend pas ; oui, oui, il a bien connu un Tony mais le Tony en question était un avorton, un moins que rien et pourtant ces yeux, même si le regard – d’une dureté à faire frémir - a changé,  mais oui, ces yeux, c’est bien Tony. Le visage de Fredo s’éclaire et se rembrunit aussitôt au souvenir de toutes les douleurs infligées au p’tit avorton.

« Salut Tony ! Ben dis donc, sacré changement ! Quelle bête tu es devenu ! »

« En effet petite merde », répond Tony, « tu permets que je te nomme ce que tu es, une p’tite merde ».

Tony, dont la colère ne peut plus être retenu, se met alors à secouer la chaise de maître-nageur pour faire descendre Fredo qui appelle à l’aide.

Ses trois anciens compagnons, toujours occupés à dragueur, rappliquent et entourent Tony. Fredo se rengorge :

« Et quoi, Tony, t’as beau avoir gonflé à l’hélium, on ne va pas moins te massacrer quand même. Allez-y les gars !! Et vous laissez pas impressionner par cette baudruche. Tout çà c’est du vent, de la gonflette ! y’a rien derrière. Foutez moi une branlée à ce mec ! »

Les trois mecs se jettent sur Tony, qui s’accroupit et se relève en rugissant et en rejetant l’assaut des trois mecs qui  tombent à la renverse. Le premier qui se relève, agressif, se jette à nouveau sur Tony qui lui décoche un direct du droit à massacrer un bœuf. Le deuxième projette alors son pied sur ses abdos et enchaîne avec des coups de poings mais Tony ne bronche pas tant ses abdos et ses pecs forment une cuirasse qu’un p’tit mec de 75 kg ne peut démolir. Il attrape le gars par l’entrejambe, le lève au-dessus de sa tête : le pauvre vermisseau se démène impuissant à plus de 2 m du sol, porté par un Tony aux musclés bandés par l’effort et  qui mentionnent son extraordinaire puissance de bodybuilder. Il projette le gars sur le troisième larron qui se trouve enseveli sous le corps de son compagnon d’infortune.

Tony se redresse ; la sueur perle sur l’ensemble de son corps ; ses pecs se soulèvent sous l’effet du souffle qu’il est en train de reprendre. Les gens autour de lui et qui ont assisté à la scène sont fascinés par la débauche de tant de puissance et de virilité. Oui, c’est bien à un Dieu qu’ils ont affaire, un DIEU  DU MUSCLE…

Tony se dirige alors à nouveau vers la chaise que Fredo commençait à descendre afin de s’enfuir, effrayé par le déchaînement de puissance auquel il vient d’assister. Il se retrouve nez à nez avec Tony : les 80 kg « tout mouillé » de l’oppresseur face au 110 kg de l’avorton. « Game over ! » les rôles ont changé.

Tony vient d’attraper Fredo qui tente bien de se débattre et de décocher quelques coups de savate mais que peuvent les ridicules arts martiaux de Fredo face au corps d’acier du bodybuilder. Tel un python, Tony enserre le corps de Fredo. Il sent contre ses pecs musclés le corps ridicule de Fredo et jouit de sa toute puissance. Fredo se débat et cette impuissance de celui qui est maintenant devenu l’avorton procure à Tony une intense, une profonde, un réelle satisfaction. Ses muscles bandés broient progressivement le corps de son adversaire qui perd connaissance et s’écroule à ses pieds, vaincu.

Finies les brimades, effacés les mauvais souvenirs, Tony, le bodybuilder, peut désormais quitter ce quartier pour n’y plus revenir…


Reçu le 16 novembre 2003. Publié le 26 novembre 2003.

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